Quand j’ai su que j’allais avoir l’été libre, ma première idée a été de faire du bénévolat. C’est désormais chose faite, le festival de théâtre de Winnipeg, le Fringe, vient de se terminer et j’y étais bénévole. Je vous raconte ?
Faire du bénévolat au Canada
Faire du bénévolat est primordial au Canada. Parce qu’ici, la notion collective la plus importante, c’est l’idée de communauté. Vous appartenez à une communauté, à plusieurs même, progressivement de plus en en plus larges. Votre communauté d’abord c’est votre famille immédiate, puis vos voisins, votre rue, votre quartier, votre ville, votre province, vos origines, votre appartenance religieuse. Tout le monde a ce mot à la bouche tout le temps, et sa suite logique, c’est give back to the community. Et le bénévolat, c’est la façon la plus simple de prouver sa gratitude à la communauté.
Il y a une manière très simple de se rendre compte de l’importance du bénévolat au Canada : le bénévolat est une rubrique obligatoire sur le CV. Vous n’allez pas mentionner vos loisirs ou vos voyages comme en France. Non, vous allez faire la liste de vos activités de volontariat. Le bénévolat est vu comme essentiel au bon fonctionnement de la société.
C’est pour cette raison qu’on recommande beaucoup aux nouveaux immigrants et aux Pvtistes de faire du bénévolat en arrivant au Canada pour obtenir la fameuse première expérience canadienne. Je n’ai pas eu ce problème en arrivant en 2017 avec mon PVT, puisque j’avais déjà passé un an au Canada en 2013-2014, avec un programme d’échange de professeurs. Mon cas est en plus un peu particulier car je travaillais dans un contexte très franco-français donc les procédures de recrutement n’étaient pas exactement les mêmes, et j’avais déjà de toutes façons cette première expérience canadienne.
Mais pour une embauche dans le monde du travail canadien, il faut que vous fournissiez des références d’anciens employeurs ou de personnes qui vous connaissent. Et quand on vient d’arriver dans un nouveau pays, c’est difficile. Faire du bénévolat au Canada permet de récupérer des contacts à mettre sur votre CV et surtout de réseauter.
Après la communauté, le réseautage est le deuxième point important de la vie quotidienne au Canada. Tout le monde connaît tout le monde ou presque dans ce pays de 37 millions d’habitants et vous trouverez presque plus facilement un job par bouche à oreille que par les canaux classiques. Cela fonctionne aussi pour un appartement, une acquisition, etc.
Faire du bénévolat, ça fait partie des coutumes canadiennes à adopter lorsqu’on vient s’installer ici. Quelles sont les autres ?
Les types de bénévolat
Niveau bénévolat au Canada, tout est possible.
Quand je vivais à Brandon, j’avais été me renseigner auprès du Westman Immigrant Services, et j’avais été bénévole dans le programme de renforcement de l’apprentissage de l’anglais des enfants nouvellement arrivés. Le processus était assez sérieux : il y avait un entretien avec la coordinatrice des bénévoles, elle appelait une référence, et il fallait faire la demande d’un casier judiciaire spécialisé dans les enfants (Child Abuse Registry check en anglais, Demande de relevé de mauvais traitement en français). Avec les délais pour faire toutes ces démarches, j’ai dû facilement perdre plus d’un mois et je ne suis pas allée à l’école tant que cela, sachant que ce n’était qu’une fois par semaine. On était trois encadrantes pour sept ou huit enfants seulement, c’était assez facile à gérer.
Depuis mon retour à Winnipeg, impossible de faire le moindre bénévolat avec les horaires de travail trop difficiles et irréguliers que j’avais. Donner du temps est difficile lorsqu’on en manque pour soi-même.
À un moment, j’avais discuté avec la galerie d’art qui cherchait des bénévoles bilingues pour faire des visites guidées en français aux enfants pendant leurs sorties scolaires. La session de formation était un lundi matin, non négociable, et il fallait être disponible au moins une matinée par semaine. On est parfois plus à la limite du job rémunéré que du bénévolat, ou en tous cas, de l’occupation pour retraités parce que personne avec un emploi de bureau classique ne peut prendre une matinée complète par semaine pour aller au musée. Tant pis !
J’ai donc dû attendre plus de deux ans et d’avoir un peu de temps libre pour pouvoir faire du bénévolat. Et mon premier volontariat à Winnipeg a été au festival de théâtre du Fringe.
Mon expérience au Winnipeg Fringe
Le Fringe, c’est un festival de théâtre international. Vous avez peut-être entendu parler de celui d’Édimbourg, c’est le même concept : pendant dix jours, il y avait 178 spectacles à voir à Winnipeg, tous produits par de petites compagnies. La programmation du festival se fait par loterie, c’est purement une question de chance et aucun jury ne fait de choix artistique. Il y a donc des pièces pour tous les goûts : du théâtre, de la danse, des marionnettes, du jonglage, des clowns, de la magie, du comique, du tragique, des comédies musicales etc !
Pendant deux semaines, tout le quartier de The Exchange se couvre de posters et il y a des représentations partout.
Le festival a besoin de beaucoup de bénévoles, à des tâches variées :
- aux stands d’information
- à la tenue du bar
- pour les animations sur le stand des enfants
- au nettoyage des sites
- à la vente de tickets
- pour l’ouverture des salles.
J’ai choisi de vendre des tickets (cash only!) et d’ouvrir les salles. Je n’avais pas réalisé que le job d’ouvreur, usher en anglais, permettait en fait de voir les spectacles gratuitement. Cela explique pourquoi c’est le job le plus populaire et on nous signifie bien qu’on n’est pas autorisé à ne choisir que ce type de missions pendant le festival.
Il faut assister à une ou deux séances de formation avant de commencer le bénévolat et surtout il faut pouvoir faire un minimum de quatre shifts, d’une durée de quatre heures minimum chacun. Il faut donc être disponible au moins 16h, en après-midi, en soirée, en week-end, c’est assez varié – mais cela peut être plus difficile à gérer pour quelqu’un qui travaille, ce qui n’était donc pas mon cas cet été.
Il y a deux systèmes, on peut construire son propre horaire ou bien demander aux coordinateurs de le faire pour nous. J’ai choisi moi-même en plaçant cinq shifts en journée, hors week-end, dont un qui a été annulé. Finalement au cours du Fringe, j’ai remis deux autres shifts. Mais 6 shifts, c’était un peu trop. Surtout si on vend un spectacle peu populaire sans affluence, l’ennui peut arriver vite… Mais heureusement, les gens étaient vraiment sympathique dans l’ensemble, les autres bénévoles comme les clients. Certains sont vraiment à fond, font ce festival depuis trente ans, voient des dizaines de spectacles.
Pour mon premier Fringe, j’ai vu quinze spectacles, douze par moi-même et trois pendant un shift d’ouvreuse. Et de ces quinze spectacles, je n’en ai payé qu’un seul ! Parce que certains artistes décident de rendre un spectacle gratuit pour les bénévoles et surtout parce que le bénévolat est rémunéré en tampons sur une carte, tampons qui s’échangent contre des billets. Un shift = un tampon par heure = au moins un spectacle de notre choix à voir gratuitement. J’ai trouvé que c’était un système assez gratifiant.
J’ai vu… une pièce comique politique sur une révolution ratée, un one-woman show d’une femme qui a des troubles de l’attention, un autre d’une femme palestinienne musulmane qui raconte son immigration en Floride et le choc culturel qu’elle a vécu, une Anglaise qui a été adoptée et a pensé toute sa vie que son père biologique était français, s’est comportée comme une française toute sa vie pour finalement apprendre que non, il venait d’Arménie, une pièce basée sur un échange épistolaire entre un soldat canadien sur le front italien et sa femme restée ici, un bibliothécaire à la recherche d’indices dans un livre rendu cent ans en retard, des ados qui ont rejoué 12 hommes en colère dans un contexte très contemporain de school lockdown, une comédie musicale sur Perséphone, etc. C’était difficile de choisir quoi voir tant il y avait de choix !
J’ai vraiment aimé le Fringe. L’ambiance était excellente et donnait envie de s’investir et d’aller voir toujours plus de spectacles. J’ai aussi vu une nouvelle facette de Winnipeg, des gens qui viennent en centre-ville, des espaces autrement assez vides avec des files d’attente. Les gens se parlaient très facilement dans la queue pour se recommander des spectacles.
Et je ne comprends pas comment j’ai pu rater ce festival les années précédentes alors que c’est mon troisième été ici. En tous cas, je vais l’ajouter à mon guide des choses à faire à Winnipeg ! Et j’y retournerai l’année prochaine !
Faire du bénévolat à Winnipeg
Vous voulez faire du bénévolat à Winnipeg ? Vous avez l’embarras du choix selon la cause que vous voulez aider :
- droits des femmes (direction la Women Health’s Clinic)
- bien-être des animaux (à la Humane Society. Il y a un rôle qui consiste à jouer avec les chats)
- musées et évènements culturels (Folklorama, Nuit Blanche)
- les sans-abris et la pauvreté (Winnipeg Harvest, Main Street Project notamment)
- les gens qui apprennent l’anglais (Immigrant Center Manitoba)
Le site de Volunteer Manitoba répertorie pas mal de ces opportunités, dans tous les domaines. Il y a aussi des offres qui demandent de parler français. Rejoindre le conseil d’administration d’une association est aussi une façon de s’investir tout en rencontrant des gens.
Quel sera mon prochain bénévolat ? Je ne sais pas encore, mais j’espère que je n’aurai pas à attendre deux ans pour pouvoir en refaire !
7 comments
Super ton article!
J’ai hâte d’y être , et je suis très tentée par le rôle qui consiste à jouer avec des chats!!! 🙂
Merci pour toutes ces infos!
Je t’en prie !
C’est très intéressant, je ne savais pas du tout que le bénévolat jouait un rôle important au Canada.
Ton article était super intéressant! Je n’aurais pas imaginé que c’était si important pour les canadiens de faire du volontariat mais après tout, pourquoi pas. C’est trop bien que tu ai pu participer au Fringe Fest de Winnipeg! Tu parle aussi de la bonne ambiance lors de la Fringe (“Les gens se parlaient très facilement dans la queue pour se recommander des spectacles.”) et c’est aussi quelque chose qui m’a marqué au Fringe à Edimbourg! Bref, je ne sais pas où je veux en venir à part que j’ai adoré ton article. Merci <3
Je ne savais pas que la communauté et le bénévolat prenaient une telle place dans la société canadienne (et sur le CV lol).
Est-ce aussi vrai dans la partie francophone ? Ou est-ce plutôt une façon de faire ‘anglo-saxonne’ (c’est quelque chose que je voyais plutôt aux USA, mais de manière moins présente dans les mégalopoles, anonymat oblige) ?
Y a-t-il quelques différences entre l’est et l’ouest (canadien) à ce sujet ?
Une chouette aventure que celle du bénévolat. Je trouve ça vraiment chouette, cet aspect communautaire au Canada. Je ne savais pas du tout que c’était comme ça. xx
Je ne savais pas que le Fringe était aussi à Winnipeg (je connaissais la version d’Edimbourg bien sur 🙂 )
Ça a l’air super!
J’ai fait pas mal de volontariat ici et c’est vrai que c’est un bon moyen de rencontrer du monde et de se faire valoir. Mais oui, pas toujours facile de concilier ça avec des horaires de boulot!
Ici je fais 2 festivals cette été. Le premier avait des shift qui duraient entre 4 et 8h! J’en ai fait un de 4h (démonter des tentes / rangement des chaises etc sur les pelouse) car je ne me voyais pas faire 8h d’un coup pendant mon weekend…